Au Printemps, quand on ne peut pas passer par la porte, on passe par la fenêtre !
C’est en gros ce que fait le magasin du Printemps qui n’a pas obtenu de signature (voir précédent article) pour ouvrir les dimanches, les organisations syndicales en présence (dont le SCID) s’y étant opposé.
Qu’à cela ne tienne ! Le Printemps déclenche une négociation au niveau national, ce qui lui permet de contourner les syndicalistes du magasin pour avoir affaire aux fédérations nationales, beaucoup plus sensibles aux arguments patronaux.
Comme la CFDT bien sûr, qui a totalement disparu du magasin Printemps Haussmann. En effet, tous les élus sont restés au SCID lorsque celui-ci a quitté la Confédération de Laurent Berger.
La direction du Printemps Haussmann préfère largement avoir la CFDT à sa table, plutôt que le SCID. Voilà pourquoi elle choisit une négociation nationale.
« Partenaires sociaux » : en marche vers les régressions !
« Les partenaires sociaux rappellent qu’ils ne sont pas favorables à la généralisation du travail dominical. » Cette petite phrase figure dans le préambule du projet d’accord, comme dans TOUS les préambules des accords d’entreprise négociés pour l’ouverture des dimanches.
Cette petite phrase a le don de nous hérisser le poil. D’abord parce qu’elle est absurde : on se met autour d’une table pour discuter des modalités du travail du dimanche, tout en déclarant la main sur le cœur qu’on n’y est pas favorable !
Ensuite parce qu’elle utilise le terme de « partenaires sociaux » qui met dans le même sac les grands patrons et les organisations syndicales. La notion de contre pouvoir dans l’entreprise a tellement été caricaturée, qu’on nous faire croire qu’il est normal que les organisations syndicales « responsables » accompagnent les régressions – pardon – les réformes dans un simulacre de grand partenariat sacralisé sur l’autel de la rentabilité !
Bref. Procédons par ordre et décortiquons les mesures une par une.
Voici ce que propose le Printemps à ce stade de la négociation :
- Le volontariat. Merci c’est la loi, sauf pour ceux qui sont embauchés sous réserve de travailler le dimanche. Pour ceux-là, c’est dimanche travaillé ou rien.
- Le paiement double du dimanche, qui est en fait soit payé, soit récupéré. Voilà une belle régression par rapport à avant : les 12 dimanches du Maire étaient payés double ET récupérés.
- 60 euros d’aide à la garde des enfants par dimanche, sur présentation d’un justificatif. Donc il faut trouver une nounou déclarée qui travaille le dimanche pour y avoir droit. Même les nounous n’auront plus leurs dimanches. Et les enfants n’auront plus leur papa ou leur maman, car dans le commerce, on travaille déjà le samedi.
- L’accès au restaurant d’entreprise. On a le droit de manger le dimanche, trop sympa vraiment. Moins sympa pour les salariés de la cantine qui devront, eux aussi, travailler le dimanche pour des compensations bien plus maigres. C’est le fameux effet « domino » dont nous parlons tout le temps dans l’indifférence générale.
- Le droit d’aller voter, « en dehors du temps de travail ». L’entreprise vous donne l’autorisation d’aller voter sur votre temps libre. Le 23 avril et le 7 mai 2017, les salariés pourront aller voter aux élections présidentielles. On le répète parce que vraiment… MERCI PRINTEMPS !
- Une ouverture de 10H max par dimanche, sauf pour toute une liste de dimanches qui pourront ouvrir plus longtemps. On pourra même travailler un dimanche 14 juillet. On est vraiment dans le progrès.
- Un plafonnement de 12 dimanches travaillés par an et par salarié. Une aberration car si l’accord est signé en l’état, les salariés pourront travailler 12 dimanches, mais seulement payés double OU récupérés. Alors que, sans accord, le magasin peut déjà ouvrir 12 dimanches par an qui sont d’office payés double ET qui donnent droit à un jour de récupération.
Du point de vue des salariés, on s’interroge…
- Il y a aussi un paragraphe « Repos compensateur ». Mais il faut bien le lire : n’y auront droit que les salariés qui travailleront le dimanche EN PLUS de leurs horaires habituels. Donc par exemple, six jours dans la semaine au lieu de cinq. Le fait de récupérer ce 6ème jour permet de ne pas le payer en heures supplémentaires majorées. Pas folle la guêpe.
- Les temps partiels recrutés spécifiquement seront tenus de faire tous les dimanches, mais ils auront droit à leurs congés payés. Si, si c’est écrit.
- Printemps « prévoit » des créations d’emplois. Là, on se rend compte à quel point le coup de la négociation nationale est une grossière manœuvre d’enfumage pour contourner la négociation d’entreprise. Car les prévisions d’emplois concernent Paris à plus de 90%. Nous imaginons que la direction a dû racler les fonds de tiroirs pour trouver des créations d’emplois pour les 2 autres Printemps concernés en province, dont l’un est déjà ouvert le dimanche (et n’a donc pas besoin d’accord) !
- Création d’une commission de suivi composée, du côté syndical, de représentants nationaux. On imagine à quel point ils seront au fait des réalités du terrain et des souffrances des salariés.
- Enfin, gros paragraphe sur la « révision » de l’accord. Ce qui arrivera fatalement. En effet le but des grands patrons étant, depuis le début, de faire du dimanche un jour normal de travail.
Voilà pourquoi il faut s’y opposer aujourd’hui ! En tant qu’organisation syndicale – dont la mission est de défendre les intérêts des salariés – on ne peut pas accepter un tel recul, un tel bouleversement des équilibres familiaux, sociaux et sociétaux.
Sans parler des conséquences économiques et écologiques qui ne sont absolument pas évoquées dans les projets d’accord.
Le SCID : pour replacer l’humain au centre des décisions.